Rénovation de sous-sol : quand un projet de construction tourne au cauchemar
Tout commença avec un simple projet de rénovation de sous-sol dans une maison du Plateau-Mont-Royal. Ce genre de travaux étant relativement courant, les propriétaires ne pouvaient pas s’imaginer qu’il les entraînerait dans des déboires juridiques et de réparation pendant les 4 années suivantes!
Pour éviter que ce genre de situation ne se reproduise et affecte d’autres propriétaires et familles montréalais, découvrez ce témoignage d’un projet de rénovation de sous-sol qui a mal tourné, et comment prévenir ce genre de situation!
Rénovation de sous-sol à Montréal : ce qu’il faut savoir
Quelques années après l’achat de la maison, les propriétaires ont désiré effectuer un agrandissement. Comme il n’était plus possible d’ajouter un étage supplémentaire, ils ont décidé de creuser vers le bas pour aménager une cave dans la maison.
À cette étape, il est important de savoir qu’en matière d’agrandissement de sous-sol, il existe deux solutions :
- La cave réduite : celle-ci consiste à creuser dans le sous-sol en laissant 4 pieds de profondeur entre les anciennes fondations et les nouvelles. Le trou creusé est alors de 11-12 pieds pour couper la circulation d’eau. L’excavation est ensuite solidifiée par des murs de soutènement en pierre pour garantir l’étanchéité de la cave.
- Sous-œuvre : méthode qui consiste à creuser sous les fondations existantes de façon très méthodique, avec des étriers de support pour éviter que les pierres ne tombent. On coule ensuite du béton, ce qui permet d’avoir une cave de la taille du bâtiment.
La méthode de sous-œuvre est plus chère, car elle nécessite un travail rigoureux et méticuleux pour s’assurer que la cave soit étanche, en plus de créer un drainage sous la dalle. La méthode de cave réduite, quant à elle, est souvent privilégiée, car elle est moins chère, car elle est plus simple. Toutefois, elle est entièrement inadaptée pour les sols argileux!
Comme vous pouvez l’imaginer, c’est la solution de cave réduite qui a été utilisée pour agrandir la cave. Et les résultats ont été désastreux.
Résultat : affaissement du bâtiment et endommagement de la structure
Comme de nombreuses maisons centenaires du Plateau, la fondation était en moellon. Comme le sol de cette zone de Montréal est réputé être argileux, il tend à gonfler et dégonfler selon le niveau d’humidité.
Malgré ces conditions bien connues, le projet de rénovation a été accepté par la ville. Et étant peu expérimentés dans le domaine, les propriétaires ont suivi les recommandations de l’entrepreneur général.
Dans ces conditions, creuser une cave réduite était la pire chose à faire. Un an après les travaux, pendant un été particulièrement sec, la terre résiduelle sous les anciennes fondations s’est asséchée. La maison s’est alors affaissée de 4 à 5 pouces, ce qui a fissuré une grande partie de la façade. Pour couronner le tout, le triplex mitoyen s’est, lui aussi, abaissé.
⚠️ CONSEIL : si vous désirez agrandir votre maison par le bas, la première étape est de contacter un expert en structure! Vous pourrez ainsi étudier les sols et vérifier les fondations pour évaluer le type de travaux à effectuer de manière sécuritaire.
Un bilan désastreux, des coûts faramineux et des démarches interminables
S’en est suivi une course de procédures juridiques, de dépenses qui s’accumulent et de recours à différents experts. Sans compter l’épreuve psychologique et émotionnelle traversée par la famille!
La première alerte s’est déclarée lorsque les voisins se sont mis à alerter qu’ils ne parvenaient plus à ouvrir certaines portes et fenêtres. Les propriétaires, qui étaient en vacances, contactent un maçon. Celui-ci leur fait un bilan inquiétant : il y a des fissures majeures sur les façades extérieures et à l’intérieur de la maison.
L’entrepreneur qui avait effectué les travaux se rend également sur les lieux, mais propose un constat moins alarmant, stipulant que c’était le résultat de mouvements de sol. De retour de vacances, la famille retrouve la maison dans un état critique.
Démarche auprès des assurances
Face à l’envergure de la situation, le premier réflexe a été de contacter l’assurance. Après près de 2 mois d’évaluation, ceux-ci ont considéré qu’il s’agissait d’une malfaçon, et que cela sortait de leur champ d’intervention.
⚠ ️ Assurance habitation : de nombreux contrats stipulent que la malfaçon est exclue des prises en charge. Aucune défense n’est donc possible dans ce cas.
Expertise des lieux
Ensuite, il leur a fallu trouver un spécialiste en sol pour faire un état des lieux. Après une étude onéreuse, le bilan est clair :
- Le mur de fondation s’est affaissé, ainsi que ceux du triplex ;
- Il y a des fissures dans toute la maison ;
- Une estimation de 450 000 $ de réparation pour projet initial de 100 000 $.
Le temps de rectifier le tout, la famille n’a pas pu vivre dans la maison pendant 3 ans.
Gestion des rénovations
Entre-temps, il a fallu s’occuper des rénovations. D’autres rapports d’expertise avaient annoncé entre-temps qu’il n’y avait pas d’armature au sous-sol, ce qui avait empiré la situation.
En attente d’un verdict juridique, toutes les réparations ont dû être encaissées directement par les propriétaires. Les travaux ont été estimés à 350 000 $ pour :
- Détruire le sous-sol;
- Le refaire aux normes;
- Pieuter les fondations du triplex d’à côté;
- Réparer les fissures;
- Ajuster toutes les erreurs antérieures faites par l’entrepreneur dans la maison (structure, etc.).
En tout, les propriétaires ont dû payer plus de 450 000 $ de réparation.
Démarche juridique
Une fois les dossiers d’expertises montés, il n’y avait aucun doute, les rénovations étaient la source de tous les problèmes survenus. Preuve à l’appui, les propriétaires ont ensuite consulté un avocat spécialisé sur la question. Celui-ci estimait 60 000 $ pour ses services pour aller en cour. Le bilan final est de 75 000 $.
Parallèlement, les propriétaires ont dû faire face à un litige avec les voisins. Ceux-ci, naturellement, demandaient des réparations et la vérification des travaux pour qu’ils soient faits dans les normes. Ce sont donc ajoutés à la facture des services d’expertise pour prouver que le pieutage de solidification se faisait dans les règles.
La responsabilité mise sur le compte de l’entrepreneur, un arrangement a été trouvé avec son assurance en tant que responsabilité civile.
Après 3 ans de rencontres avec les avocats, le dossier était prêt à passer devant un juge. Quelques jours avant l’audience, une proposition a été faite aux propriétaires et ceux-ci l’ont acceptée. Ils ont gagné le litige en obtenant 500 000 $ sur les 600 000 $ demandés (comprenant les frais de réparation et des dédommagements généraux).
? Un dossier documenté et bien monté peut inciter la partie adverse à trouver un arrangement. D’autant plus qu’une perte de litige laisse une trace sur le dossier de l’entrepreneur, ce qui peut affecter ses assurances.
Prévenir plutôt que guérir : s’entourer des bons experts
L’épreuve a été de taille : 4 ans de conflit, d’emprunts, de travaux interminables, sans pouvoir jouir de la maison. En plus d’assumer les mésaventures psychologiques et financières, la famille n’a pas vu passer ces années, étant sans cesse en train de jongler entre défense, gestion des travaux, stress et incertitude… Une épreuve qui n’est souhaitée à personne!
Pour prévenir d’une telle situation, quelques leçons à retenir :
- Avant d’effectuer des travaux qui touchent à la fondation : trouver de bons experts pour évaluer les lieux!
- En cas de litige, s’entourer d’avocats et d’experts chevronnés. Vous vous battrez seul, mais avec de bonnes personnes.
- Préserver votre santé physique et mentale en consultant des experts plutôt que d’évaluer les choses par vous-même. Vous vous enlèverez une surcharge mentale et éviterez des impacts sur la famille.
Vous pouvez également apprendre à maîtriser vos dépenses pendant des rénovations, et éviter des frais supplémentaires ou inutiles.
Nous espérons que ces conseils vous aideront à prendre des décisions éclairées en matière de rénovation, pour jouir pleinement des lieux, en toute sérénité!